Un article de Jean-Marie Wynants paru dans le journal Le Soir du samedi 16 octobre 1993.
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Des amis qui vous veulent du bien.
Rock francophone au Botanique.
Tous ceux qui ont, à un moment ou à un autre, rencontré Marie Audigier la trouvent adorable. Mais c’est un peu court pour monter sur scène. Jeudi soir au Botanique, en ouverture d’une soirée consacrée au rock francophone auvergnat et belgicain, ses limites sont rapidement apparues. Gentille, mignonne, sympa, tout ce qu’on veut, mais pour ce qui est de la chanson, on est loin du compte…
L’accompagnant à la guitare, Alain Bonnefont prend ensuite le relais au centre de la scène. Souvent comparé à son pote Jean-Louis Murat, Bonnefont fait mieux que se défendre. Voix plus solide qu’il n’y paraît, rythmes variés, même si on reste dans des tempi relativement légers, humour dans les courtes présentations, Bonnefont est la première bonne surprise de la soirée. L’apport d’un comparse utilisant à merveille le sax et le mélodica apporte en plus une couleur chaleureuse et variée au répertoire. Et puis un Auvergnat qui parvient à écrire une histoire d’amour se déroulant entre l’avenue Louise, la place Stéphanie, la chaussée de Waterloo, l’avenue Brugmann et le Sablon ne peut pas être un manchot.
La deuxième bonne surprise est venue avec la Variété. Conçu au départ comme un projet purement discographique, la Variété ne semblait guère armée pour monter sur les planches. Et pourtant, cela marche. Dès leur première apparition scénique, Rudy Léonet, Bernard Dobbeleer et Alain Debaisieux semblent avoir trouvé leurs marques. Bien sûr, tout n’est pas encore parfait, mais le pas accompli est déjà énorme. Les trois membres fondateurs se sont adjoint un quatrième compère: très spectaculaire mais surtout très bon guitariste, Curt apporte un plus évident à la musique du groupe qui en avait besoin pour la scène. Mais les trois autres ne restent pas inactifs pour autant. Derrière ses claviers, Debaisieux est le plus discret en homme-orchestre de l’ombre, tandis que Dobbeleer quitte quelques fois son pupitre pour s’emparer d’une guitare qu’il manie avec sa sobriété et son efficacité habituelles. Quant à Léonet, il étonne par son aisance sur scène. La voix n’est pas celle de Pavarotti, mais elle tient son rôle parfaitement avec une assurance qui étonne. Qui plus est, Rudy parvient à bouger sur scène avec une ambiguïté et une présence qui rappellent tantôt Daniel Darc, de Taxi Girl, tantôt Marc Almond, à l’époque Soft Cell. Bref, ce qui apparaissait à certains comme un simple coup médiatique pour «happy fews» est en train de s’affirmer comme un des groupes les plus originaux et les plus convaincants de ces dernières années. Des textes se démarquant des ritournelles habituelles, un son, un style, une attitude… La Variété est bien partie pour durer.
Après cette excellente surprise, Marc Morgan jouait sur du velours pour finir la soirée en beauté. Avec un répertoire entièrement neuf, l’ex-leader des Tricheurs est en train de faire un malheur sur les radios FM françaises. Il faudra probablement une fois de plus, pour lui comme pour la Variété, que l’Hexagone se les accapare pour que certains programmateurs se décident enfin à les découvrir chez nous. Mais, en attendant, Morgan et sa nouvelle petite bande font un tabac. Entouré d’excellents musiciens et rejoint par l’ex-Zap mais bientôt Mama, Cecilia Kankonda, il propose un set pétant de santé où l’humour est le bienvenu entre toutes les chansons. De «Tresses de tristesse» à «Un ami qui vous veut du bien», tout le nouveau répertoire y passe. Le son est impeccable, l’énergie omniprésente, et Marc chante mieux que jamais, remarquablement soutenu par une Cecilia lumineuse et souriante. Et c’est autour de Morgan et sa bande que la soirée se terminera par un «Vertige de l’amour» collectif, joyeux et saignant, rappelant que ces artistes-là sont de la race des gens de goût.
Jean-Marie Wynants.
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