Une Marque Morgan ?

Un article de Gilles Renault paru dans le journal Libération du 28 janvier 1994.

Marc Morgan

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Une Marque Morgan ?

Dans le cadre de la «Semaine de la chanson française», l’un des fleurons de l’école «Fnac music», passe au «Festival débranché» de Bobino, 20, rue de la Gaité, Paris XIVe. à 20h, avec Catherine Lara.

J’entre dans votre vie / Par une mélodie qu’on retient / Mais continuez / Faites comme si j’étais pas là.” S’il existe une raison permettant d’expliquer le succès actuel de Marc Morgan (Notre mystère, nos retrouvailles, tube entêtant en «rotation» FM et télé), elle est peut-être là : dans cette manière de ne pas y toucher, de prendre ses quartiers, dans un univers. (infra?) pop dont l’intéressé aurait patiemment assimilé les règles (mélodies, arrangements, pont, refrain). Né Marc Wathieu, ce citoyen belge semble être passé directement des virées boy-scout, au son d’Hugues Aufray, à la trentaine rangée des voitures (femme, deux enfants, maison, prof de dessin à l’Institut Saint-Luc de Bruxelles) via America et Elton John. Entre-temps, Marc Morgan aura pourtant fréquenté le milieu musical, avec des bonheurs divers. Objectif Lune, les Révérends du Prince Albert ne laissent aucun souvenir, mais les Tricheurs si : un petit tour (33t) et puis le split. Ensuite, c’est La Variété où Morgan co-signe et joue de la guitare. Un cygne sur l’Orénoque sera le premier enregistrement perso du personnage. À qui, sous ses airs Innocents (look Jipé : béret et lunettes), on promet monts et merveilles : «La substantifique moëlle de la chanson française est peut-être en passe de devenir les 3 M» (Manset, Murat… Morgan).
Marc Morgan. Ça m’embarrasse.
Libération. Tes groupes, quels enseignements ?
M.M. Un idéal d’amitié adolescente, qui ne dure qu’un temps. À l’arrivée, une certaine amertume. Ceux avec qui j’ai joué manquaient d’ambition. Vouloir ressembler à Joe Jackson, Costello !…
Libération. Le succès ne met-iI pas en péril ta liaison avec La Variété ?
M.M. Au contraire. La Variété est un projet de Rudy, mon meilleur ami. L’album n’a pas reçu l’accueil escompté ; si mon début de notoriété, peut aider le groupe….
Libération. Côté Belgique ?
M.M. L’épisode Tricheurs a facilité les choses. Ma maison française m’a tiré de la souricière; la Belgique est un petit pays : ça peut décoller vite, en revanche les possibilités de développement sont limitées. C’est d’ailleurs ce qui a perdu les Tricheurs.
Libération. Des affinités ?
M.M. Je me sens proche de Télex avec Marc Moulin, Jacques Duvall aussi, et Jean-Marie Aerts, ex-TC Matic et toujours avec Arno. Ce que je hais : La Muerte, Front 242, tout ce «rock» caricatural, théâtral.
Libération. «L’instinct de contradiction / Est une bénédiction» (Mauvais Exemple) : histoire de contrarier une image trop sage ?
M.M. Le titre résume mon goût pour une pop accessible n’excluant pas la possibilité de dévier, vers une deuxième lecture. D’une manière plus générale, je pense qu’il faut explorer ce qui est mauvais. C’est de là que viennent les bonnes choses.

Gilles Renault.

CD & K7 “Un cygne sur l’Orénoque”, Fnac Music.

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